Accord de libre-échange avec les pays du Mercosur

 

Destiné à libéraliser les échanges entre l’UE et quatre pays d’Amérique latine, le traité commercial avec le Mercosur a été signé le 6 décembre 2024. Il doit encore être ratifié avant d’entrer en application.

Les textes en PJ ne sont pas des traductions officielles.

 

Contexte :

  • Le 29 juin 2019, l’Union européenne et les pays du Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay et Paraguay) ont conclu les négociations relatives aux volets commerciaux de l’accord de libre-échange.
  • En juillet 2020, la conclusion des négociations sur les volets politique et de coopération de l’accord ont été réalisées.
  • Le 6 décembre 2024, l’UE et le Mercosur ont conclu un accord politique sur un accord de partenariat UE-Mercosur amélioré.

La Commission européenne a publié le texte de l’accord qui reprend les textes convenus en juin 2019, ainsi que les éléments améliorés et supplémentaires résultant des négociations menées entre mars 2023 et décembre 2024.

Afin de rendre plus transparents les résultats des négociations de 2024 par rapport à ceux de 2019, la Commission publie également un document explicatif de ces élémentsLa partie concernant l’accès aux marchés reste globalement inchangée par rapport au texte conclu en 2019.

Le volet commercial éliminera à terme 91% des droits de douane imposés par les pays du Mercosur sur les produits européens et 92% des droits de douane appliqués par l’Union européenne sur les produits sud-américains qui arrivent dans l’Union. 

Afin de limiter l’afflux de produits agricoles ou alimentaires très concurrentiels en Europe, la Commission européenne a négocié des quotas alimentaires à droits de douane réduits. Ceci veut donc dire que les produits importés des pays du Mercosur au-delà de ces quotas seront soumis aux droits de douane normaux. Aussi, afin de protéger sa filière agricole et de contenir le volume des produits sud-américains sur le marché européen, l’Union européenne a négocié différents quotas et mesures de protections pour les secteurs suivants : viande bovine, volaille, produits à haute teneur en sucre, éthanol et riz.  

En retour, l’UE bénéficiera notamment :

  • d’une libéralisation sur les vins en bouteille (pas en vrac) ;
  • d’un contingent de 30 000 t de fromages (hors mozzarella), de 10 000 t de lait en poudre et de 5 000 t de préparations pour nourrissons (à titre de comparaison, l’UE a obtenu avec le Japon un contingent de 31 000 t de fromages et de 15 000 t de lait en poudre) ;
  • de la protection de 355 IG européennes, ce qui marque une ambition élevée, a fortiori dans une zone acquise au droit des marques, même si le niveau de protection réel est faible.

Ces concessions limitées, ou « quotas », sont assorties de clause de sauvegarde visant à protéger le marché de l’Union européenne en cas de préjudice grave causé par les importations du Mercosur. Aussi, afin de rassurer, la Commission européenne s’est engagée à soutenir financièrement les secteurs, notamment par l’allocation de fonds d’urgence, au-delà des clauses de sauvegarde, en cas de grave perturbation du marché.

Prochaines étapes dans le processus d’adoption de l’accord :

Les prochaines étapes sont les suivantes : 

  1. le texte de l’accord sera tout d’abord vérifié par des juristes et traduit dans toutes les langues de l’Union ; 

 

  1. la Commission transmettra alors une proposition au Conseil et au Parlement pour signature et conclusion de l’accord. Cette proposition peut prendre différentes formes selon la base juridique choisie : un accord mixte qui requiert l’approbation de l’Union et de tous les États membres avant d’entrer en vigueur OU deux accords distincts, l’un mixte (approbation de l’Union et de tous les États membres) et l’autre ne relevant que de la compétence exclusive de l’Union (nécessitant uniquement une ratification de la part de l’Union) qui concerne entre autres le volet commercial de l’accord
  1. Il revient, après transmission de la proposition par la Commission, au Conseil de l’Union européenne, composé des ministres des 27 États membres, de se saisir de la procédure d’adoption de l’accord. 

Positions des Etats membres en décembre 2024 :

Le texte doit être ratifié au Conseil de l’UE en « gagnant l’approbation d’au moins 15 Etats membres représentant 65% de la population de l’UE » puis réunir une majorité au Parlement européen.

Pour le moment, la Pologne, l’Italie et la France ont marqué leur opposition à cet accord, franchissant ainsi le seuil de 35% de la population nécessaire à une minorité de blocage.

A l’inverse l’Allemagne et l’Espagne font monter la pression pour une conclusion rapide de l’accord et blâment le « patriotisme erroné » de Paris.

La France reste opposée à l’adoption définitive de l’accord. Après sa signature à Montevideo le 6 décembre 2024, le Président de la République Emmanuel Macron a déclaré que le projet « était inacceptable en l’état » et a rappelé devant les ambassadeurs français le lundi 6 janvier 2025 « La messe n’est pas dite (…) On continuera de défendre avec force la cohérence de nos engagements et donc (une) politique commerciale cohérente ». En novembre 2024, le Parlement français avait déjà majoritairement approuvé la position du gouvernement, soit un rejet du texte « en l’état ».

Comme vous le savez, la France reste opposée à l’adoption définitive du traité UE-Mercosur. Après la signature de l’accord le 6 décembre 2024, le président Emmanuel Macron a déclaré que le projet restait “inacceptable en l’état”, exprimant ses préoccupations quant à l’impact sur l’agriculture française et l’environnement. En novembre 2024, le Parlement français avait majoritairement approuvé la position du gouvernement dans les négociations sur l’accord, soit un rejet du texte “en l’état”. Selon la Commission européenne, les clauses miroirs défendues par la France n’ont pas fait l’objet de négociations et ne figurent donc pas dans la version finale de l’accord.

 

Position de l’ANIA :

Les premiers retours des adhérents concernant cet accord font ressortir les points suivants :

  • Cet accord octroie des concessions agricoles importantes qui présentent de sérieux risques, à la fois en matière environnementale et en matière de distorsion de concurrence (en raison du différentiel important de normes). Pour rappel, les négociations n’ont pas abouti à la création de « clauses miroirs » (réciprocité des normes de production). En effet, les pays du Mercosur, souverains, décident de leurs conditions de production
  • Afin de conclure un accord commercial juste avec les pays du Mercosur, nous devons veiller à l’instauration d’un level-playing-field juste qui n’existe pas. Les clauses miroirs demandées par la France n’ont pas fait l’objet de négociations et même si les normes européennes ne sont pas remises en cause par ces accords, nous attirons l’attention sur la nécessité d’appliquer la réglementation européenne pour les produits importés (en amont également), et de renforcer les contrôles aux frontières de l’UE, afin de s’assurer que seuls les produits respectant les normes techniques, sanitaires et phytosanitaires européennes entrent dans le marché européen.
  • Les contrôles sont réalisés sur les systèmes de production des pays tiers par les services de la Commission européenne mais les mesures correctives tardent parfois à s’appliquer.
  • De plus, les contrôles réalisés par les douanes de chaque Etat membre à l’arrivée aux frontières des importations manquent d’uniformité et d’efficacité (surtransposition réglementaire de la France).
  • Il faut sécuriser les approvisionnements et les exportations de la France et de l’Europe via des accords de libre-échange équitables et respectueux des normes règlementaires européennes.
  • Enfin, concernant la protection des Indications Géographiques (IG), un nombre important est reconnu dans l’accord, mais ce dernier n’exige pas des pays du Mercosur qu’ils ajustent leurs législations domestiques en conséquence, ce qui limite l’efficacité de la protection des IG. De plus, seule la reconnaissance des IG déjà existantes est garantie, sans possibilité d’ajouter de nouvelles IG postérieurement.

 

Afin de finaliser la note de position de l’ANIA sur le sujet, n’hésitez pas à nous faire parvenir vos commentaires et analyses sectorielles avant le 15 janvier.